Les costumes de l’acteur Macron.

Macron, le footeux.


Footballeur, Top Gun, sous-marinier, tennisman… Le maillot de football enfilé par le chef d’État jeudi dernier n’est pas la première mise en scène théâtrale à laquelle ont eu droit les Français depuis le début de son quinquennat.
Les costumes du comédien Macron.

Ce 14 octobre 2021, le président Macron endossait le costume de footballeur. Pourquoi pas d’ailleurs ? Comme Valéry Giscard d’Estaing le fit en 1973, les vieilles recettes électoralistes de l’ancien nouveau monde ?…

Cette fois-ci, Emmanuel macron met le maillot bleu ciel au profit de la Fondation des Hôpitaux de Paris, présidée par Brigitte Macron (vous savez les pièces jaunes), à qui il remettra un chèque de 50 000 euros. On le vit donc courir sur le terrain, crampons aux pieds, short flottant, avec un numéro 3 dans le dos. Par un plat du pied, il transforma — tout comme Giscard — un penalty bien opportun. D’abord milieu défensif, puis passeur d’un ballon décisif, Emmanuel Macron contribua — tout comme Giscard — à la victoire de l’équipe du Variétés Club de France contre l’équipe locale, le personnel soignant du CHU de Poissy (Yvelines). Les plus ou moins grandes célébrités grandes battirent donc par un score sans appel (6-1), les vraies gens qui sauvent : comme quoi, on voit qui est le nouveau boss au football !

À l’époque de VGE, ce n’était que le conseil municipal de Chamalières contre les commerçants du coin. Enfin, nous ne saurons jamais si Emmanuel Macron a pris — comme VGE le fit — la traditionnelle douche commune d’après match : la vidéo de Valéry Giscard-d’Estaing interviewé dans les douches restera célèbre. Notons que le président Macron ne ménagea pas ses efforts durant 75 minutes — tout comme VGE qui cependant, ira jusqu’au bout des 90 minutes.

Mais profitons de ce nouvel épisode des costumes du chef de l’État pour rappeler une phrase qu’il prononça le 20 juillet 2017, à propos de la politique de Défense nationale sur la base aérienne d’Istres ; et qui mise en perspective aujourd’hui détonne : « La crédibilité de notre dissuasion [nucléaire] repose d’abord sur vous, les femmes et les hommes qui la mettez en œuvre. Je le sais, je l’ai encore vu à l’instant, vous agissez avec un très grand professionnalisme et dans la plus absolue discrétion. » Une annonce faite pratiquement au lendemain de la démission du chef d’état-major des armées Pierre de Villiers : le ton est ferme, la voix est moins aiguë que d’habitude, les yeux sont fixes. Une scène de théâtre.

Ce jour-là, Emmanuel Macron se la jouera chef des Armées d’une façon un peu plus que nécessaire. Pour cela, il endossera la combinaison moulée de pilote de chasse façon Top gun. Jugez la scène immortalisée sur internet : sur la base aérienne d’Istres, il s’avance toutes dents dehors à la rencontre des militaires ; ça rigole sous cape, ça pue la testostérone de salon bleu pastel et moquette blanche : un pastiche de style « poutinien » de pacotille. Même pas peur. Pour mériter le port d’une combinaison de pilote de chasse et éviter le ridicule, Laurent Fabius avait d’abord volé sur Mirage 2000. Comment être admiratif devant Sa Majesté du 55 Faubourg qui, arrivé par avion présidentiel, repartira piteusement pour Paris à bord d’un simple avion ravitailleur ?

Quel sens donner à ces déguisements ? Où sont « le grand professionnalisme et la plus absolue discrétion » dont il parlait en tant que Chef des Armées ? Pourquoi ces déguisements de carnaval, genre Halloween, Mardi gras ou fête de la musique élyséenne ? Le magazine Marianne nous donnait quelques éclaircissements sur la visite en Top Gun du président Macron : « S’habiller en militaire quand on va rencontrer l’armée, cela renvoie au concept sociologique de tribu. On suscite l’identification en envoyant un message du type : je fais partie de votre groupe, on peut donc travailler ensemble. »

Aujourd’hui, des esprits plus chagrins ajouteront ce jeudi 14 octobre 2021 : le match de foot fut une façon électoraliste de flatter la tribu des footballeurs. Et des gogos. Notons qu’il n’était guère mieux dans son petit costume de sous-marinier lors de sa visite du SNLE Le Terrible ; mais au moins il se fit hélitreuiller pour monter à bord, avant de plonger crânement à… 70 mètres de profondeur. Depuis, on l’a vu aussi jouer à la standardiste élyséenne pour répondre en direct aux appels des Français ; au boxeur de salon à l’Élysée pendant ses cours de boxe particuliers ; au tennisman en fauteuil roulant faisant la promotion de la candidature de Paris aux Jeux olympiques ; en bateleur de foire et bras de chemise pendant le Grand Débat ; ou en jeans et blouson de cuir lors de maraudes nocturnes visitant les SDF avec un photographe immortalisant ces moments… Encore heureux qu’Emmanuel Macron ne se soit pas déguisé en pompier lors de l’incendie de Notre-Dame : nous aurions pu alors le voir asperger les tours du haut de la grande échelle. Et que n’aurait-on pas dit de le voir se balader en petit costume de policier avec Alexandre Benalla à ses côtés, en blouse de médecin urgentiste lors des confinements, ou en veste de chasseur de merles ou d’alouettes ?

En 2017, l’Emmanuel Macron en costume de Top Gun cherchait à imprimer la marque du chef afin de pallier sa méconnaissance de l’armée, et son manque d’autorité. En 2021, en costume de footballeur, essaie-t-il de nous vendre la figure d’un futur gagnant à la présidentielle de 2022, écrasant le match par avance ?

Mais nous savons d’expérience que l’habit n’a jamais vraiment fait le moine !

Yves Gautrey / Revue Front Populaire, le 19 octobre 2021.

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